Le recrutement au Japon vu par Stéphane Voyer, DRH de LVMH Japon

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Recrutement © Blique Actimum Recrutement & Ressources Humaines

Partager les attentes des recruteurs au Japon et nous permettre de mieux appréhender le secteur des ressources humaines au Japon. Voila le défi que proposait de relever Stéphane Voyer, DRH de LMVH Japon depuis 2016, lors du petit déjeuner de l’association Femmes Actives Japon du 17 avril 2018.

LVMH au Japon

Stéphane Voyer a présenté les activités de LVMH au Japon en quelques chiffres.

LVMH Japon regroupe 25 sociétés, appelées « Maisons ». Le Japon est le deuxième marché mondial du groupe et constitue une région en tant que telle au sein de la société avec un reporting direct au siège à Paris. 75% des collaborateurs travaillent en magasin. C’est essentiellement une société de retail. Au total, le groupe compte 700 points de vente et emploient 7000 personnes au Japon.

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Dix Maisons du groupe LVMH sont présentes à Ginza 6 inaugurées il y a un an © Vivre à Tokyo

LVMH Japon est une société très féminisée. 80% des collaborateurs sont des femmes. 53% des store managers. 40% des Présidents de maison.

Le réseau RH regroupe, quant à lui, 50 managers, tous japonais. Stéphane Voyer est le premier non-japonais à occuper ce poste.

Le recrutement au Japon

Un marché tendu …

Avec un taux de chômage de 2,4 %, les candidats à l’emploi sont en position de force sur le marché japonais. En moyenne, on estime que les talents reçoivent deux propositions en 10 jours. Dans les grands groupes japonais, les recrutements se font via les universités un an avant la fin de leur formation de quatre ans, soit à la fin de la troisième année d’étude.

Dans ce contexte, les entreprises étrangères se disputent les candidats qui parlent anglais (10% environ) et qui sont prêts à tenter l’aventure. En effet, travailler dans un grand groupe japonais continue d’être la voix royale. Ceux qui acceptent de venir travailler dans une entreprise étrangère ont souvent un parcours personnel différent de leurs camarades : ils ont étudié ou travaillé à l’étranger, l’un des membres de leur famille a déjà travaillé dans une entreprise étrangère… Il faut noter que LVMH n’est pas en position dominante car les métiers du retail au Japon, dans lesquels la formation commence souvent en magasin, ne sont pas aussi «prestigieux» que des domaines comme la banque, la production ou l’ingénierie.

…orchestré par les agents. 

Les entreprises étrangères doivent également composer avec une autre particularité du marché de l’emploi japonais: le recours à des agents (tels des agents sportifs qui placent leurs joueurs). Le recrutement direct est quasi inexistant au Japon. Dans le business des agents il y a deux catégories: les retainers et les contingencies. Les retainers sont des grands cabinets connus qui signent un contrat avec l’entreprise et sont certains d’être payés à la fin. Ils sont minoritaires au Japon. Dans le cas des contingencies, ce sont des cabinets qui vont tous concourir pour trouver le candidat idéal. Ils ne sont payés qu’en cas de succès. 90% des recrutements chez LVMH Japon passent par ces agents. Ils sont coûteux (25 à 30 % du salaire annuel de la première année, quel que soit le niveau de recrutement) mais incontournables. Et ils suivent leurs candidats tout au long de leur parcours professionnel. Un conseil donc pour les étrangers : si vous cherchez un travail n’attendez pas les annonces ! Contactez des chasseurs de tête!

Pour LVMH Japon, l’objectif est d’essayer de limiter ce recours aux intermédiaires et de créer des interactions directes avec les talents. Mais cela reste compliqué. LinkedIn, par exemple, est, pour l’instant, très peu utilisé au Japon car il est mal vu de se démarquer et s’exposer ainsi revient à annoncer ouvertement que l’on souhaite changer de job, ce qui ne se fait pas. Les choses évoluent, cependant, et le réseau grandit petit à petit. Les RH japonais se forment également à l’utilisation de ce nouvel outil. Par ailleurs, le stage, qui est un outil de recrutement privilégié en Europe, ne se pratique pas au Japon, même dans des domaines très techniques. Le premier contact de l’étudiant avec l’entreprise est le processus de recrutement.

Comment conserver les salariés dans une entreprise internationale ?

Stéphane Voyer nous a présenté les difficultés rencontrées pour recruter. Ensuite se pose la question  » comment garder les talents ? ». Sur ce point, les entreprises étrangères ont des atouts que les DRH mettent en avant au quotidien.

Le premier atout, c’est un un environnement bienveillant où l’efficacité est plus importante que l’ancienneté. Là où, dans une entreprise japonaise, on progresse en fonction de son âge et de son genre, les entreprises étrangères offrent davantage de chance à la méritocratie. 

Le worklife balance est aussi un élément important. Les entreprises étrangères offrent souvent une plus grande flexibilité, la liberté de gérer son agenda, ce qui permet un meilleur équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle. Cela séduit les jeunes générations, de plus en plus sensibles à ce sujet.

Néanmoins, le DRH se doit d’être toujours attentif à ses salariés et de ne pas hésiter à anticiper leur avenir professionnel en faisant des propositions. Contrairement à la France où les salariés ont tendance à solliciter eux-mêmes les RH pour obtenir de l’avancement, le salarié japonais ne demande pas. S’il n’est pas satisfait, il contacte son agent qui lui cherche un autre emploi.

Des formations ont été mises en places pour permettre les évolutions de carrière  au sein du groupe et notamment pour permettre l’accès de certains salariés à haut potentiel à des postes de managers. Ces personnes, qui ont développé les «soft skills» nécessaires et ont réussi à intégré la culture de l’entreprise, sont particulièrement précieuses. Les RH doivent être très didactiques et pro-actifs pour les retenir.

HM

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